Nouvelle publication d’Alberto Fabio Ambrosio, professeur de théologie et histoire des religions à la LSRS, qui se consacre à l’étude de l’articulation entre la mode vestimentaire et religieux en mettant en place une réflexion théologique à partir de ces phénomènes socio-culturels.
Une fois confié à une publication de 2020 le soin de planter les jalons d’une théologie chrétienne de la Mode, j’ai continué dans cette voie que je m’étais ouverte en 2018 : elle explorait le couple Mode et Religions, qui ne demandait qu’à être approfondi. L’essai suivant, Moda e Religioni. Vestire il sacro, sacralizzare il look (Mode et Religions. Habiller le sacré, sacraliser le look, la version française est prévue pour la fin de l’été 2024) qui plaçait les deux termes du binôme sur un pied d’égalité, mettait en œuvre mon désir de présenter la mode comme la forme sécularisée, laïque, d’un vrai culte : celui de l’esthétique vestimentaire et des apparences sociales. Si original que puisse paraître le rapprochement, force est de constater que la mode se présente comme un système économique, financier et esthétique de premier plan dans les sociétés contemporaines au point d’y afficher le profil d’un culte. S’il n’est pas rare de la voir appréhender dans sa dimension frivole, elle présentera à qui en examine sa vraie facette les caractères d’un vrai système qui est tout sauf innocent, anodin, frivole en un mot. Le présent livre, Per una morale contemporanea. Critica della moda pura (Milan, Mimesis, 2024), répond cette fois à mon intention de poser les bases d’une réflexion englobant philosophie et éthique, sans pour autant se montrer religieuse, à propos des problèmes que la mode pose à la morale. Surconsommation, culte des apparences débouchant sur un surcroît d’inégalité sociale, genèse d’une culpabilité honteuse dans les signes manifestant une élite ne forment que quelques-uns des éléments pris en compte, et pour ne rien dire de l’effet désastreux sur la planète de l’industrie qui arrive au deuxième rang mondial de celles qui polluent le plus. Umberto Eco, voilà quelques décennies déjà, assurait que tous les matins la gent masculine fait de la sémiologie en nouant son nœud de cravate, et je n’hésite pas à le gloser en affirmant pour ma part que tous les matins, homme ou femme, nous « faisons de l’éthique » en décidant de nos vêtements. Ceux-ci sont-ils produits dans le respect de la justice sociale ? Sont-ils le résultat d’une mise à contribution correcte et rationnelle de l’environnement ? Ne contribueraient-ils pas à engendrer de pénibles inégalités d’apparence ? Telles sont donc les quelques questions fondamentales de morale posées à la Mode par ce nouveau livre.