Anise Koltz est décédée le 1er mars 2023. La LSRS avait eu l’honneur de l’accueillir le 21 juin 2018 dans le cadre du cours « Spiritualités en dialogue » organisé par le Prof. Jean Ehret. Notre institution tient à honorer cette grande dame de la poésie et lui témoigner de toute sa reconnaissance pour l’œuvre à travers laquelle une spiritualité particulière s’est faite. L’admiration pour la force de son verbe va de pair avec celle pour la personne.
Nous publions ci-dessous la vidéo qui présente la conférence du Prof. Ehret suivie de la réponse de Madame Koltz.
Lors des funérailles de la poétesse, le directeur de la LSRS a prononcé une courte allocution portant sur le rapport souvent conflictuel d’Anise Koltz à « Dieu » :
« Dieu est mort – Finis, fleurs et petits oiseaux », tel est le titre de l’introduction qu’Anise Koltz a rédigée pour son anthologie Somnambule du jour, publiée en 2016. Elle ajoute : « L’homme est seul face à lui-même, face à l’univers ». Son œuvre est aussi peuplée de morts, notamment de sa mère, mais aussi du grand amour que fut René, son mari. « Dieu » serait-il aussi un mort encore présent ?
Mais quel « Dieu » ? Celui d’abord, doctrinaire, dont on avait essayé de la gaver dans sa jeunesse. Un dieu justicier justifiant des pouvoirs. Dans les années 90, sa révolte contre ce dieu chrétien se manifeste très fortement dans ses recueils Chants de refus I et II. En 1999, dans son recueil La Terre se tait, elle rapproche la connaissance-ignorance de Dieu et celle de soi : « Dieu // Que Dieu / demeure question – // L’eau non plus / ne demande à l’océan / “Qui es-tu ?” // Pour Dany ».
Lors d’une soirée organisée en 2018, elle affirma : « Je n’ai aucune hostilité vers Dieu, aucune, au contraire, je respecte ce qu’il a fait. Souvent je me fâchais, oui, parce que je ne comprenais pas […]. C’est un long chemin, un beau chemin, intéressant, mais plein de souffrance. […] J’ai trouvé un petit chemin comme ça qui m’a ouvert les yeux. » Quel dieu, donc ? Un dieu « dont le destin […] / dépend des hommes // Celui des hommes ne dépend[ant] plus de Lui ».
Mon dieu, désormais, vit aussi grâce à celle que j’avais rencontré en 1996 au Centre universitaire. Anise avait écrit : « Sur les autels / nos dieux pourrissent // N’ajoutez pas un ciel / au ciel / mais une terre / à la terre » ; moi, théologien, je venais d’« entrer en littérature », assoiffé de vie. La passion pour la vie, l’amitié, la langue nous ont unis et ce passé composé – de mots, de gestes, de souvenirs – reste, un accompli au présent.
Nous renvoyons également à l’article de J. Ehret, « “Je me pose sur ton tombeau” – Médi(t)ation poétique d’Anise Koltz », dans S. Kmeč, R. Philippart, A. Reuter (dir.), Ewige Ruhe ? Grabkulturen in Luxemburg und den Nachbarregionen, Luxembourg, Capybarabooks, 2019, p. 193-194. Désormais la poétesse et son mari reposeront côte à côte dans le même tombeau au cimetière de Junglinster.
Jean Ehret